"Un monde sacré !", à la rencontre des musiciens du Festival 2025

En 2024, nous avions évolué dans les paysages champêtres et montagnards au son des fifres et tambourins au milieu des bergers, au gré des symphonies pastorales et tableaux que la nature et les artistes nous avaient offerts.
Cette année, pour notre 16ème Festival, nous montons plus haut et atteignons les sphères célestes et ce qu’elles ont inspiré aux compositeurs qui ont su, par leur inspiration et leur talent sans limites, nous élever vers le sacré.
Il faut vous préparer à apprendre de nouveaux noms de musiciens qui enrichiront votre dictionnaire de musicologues déjà avertis et revoir votre latin !
Par la diversité des œuvres, nous évoluerons au travers des musiques les plus célèbres de la Renaissance mais surtout nous découvrirons aussi des artistes peu connus qui, éveillant notre curiosité, nous feront passer de la musique sacrée à une… « sacrée musique » !
Episode 4
Au Moyen-Âge, les fêtes religieuses sont à l’origine de fêtes populaires jalonnant toute l’année et venant rompre le rythme immuable des saisons et du travail, permettant des moments de rencontres joyeux, auxquels nous nous mêlerons grâce à l’ensemble Obsidienne.
Quels sont les auteurs des XVème et XVIème siècles que nous écouterons ?
Alfonso El Sabio (1221-1284)

Commençons par un roi, celui de Castille et de León ! Alphonse X le Sage ou Alphonse le Savant. Il est connu pour ses nombreux écrits, érudit, entouré d’intellectuels, de savants, d’astronomes, intéressé par l’histoire, la poésie, les religions, par la guerre et la conquête du pouvoir sur le Saint Empire, il est aussi compositeur à ses moments perdus (en avait-il ?). Il a participé aux Cantigas de Santa Maria dont nous entendrons un extrait.
Guillaume de Machaut (1300-1377)
Au siècle suivant, Guillaume de Machaut, est supposé être né à Reims autour des années 1300, mais on est sûr qu’il est mort à Reims !
Musicien et poète, il a joui d’une grande popularité dans les deux domaines et son influence s’est répandue dans toute la production artistique européenne.
A 20 ans environ, il devient secrétaire de Jean de Luxembourg, roi de Bohême qu’il accompagne dans toutes ses résidences et toutes ses campagnes militaires, il voyagera dans toute l’Europe, Pays Bas, Pologne, Silésie, Italie, Russie, Allemagne ! Robuste constitution !
Il devient chanoine appartenant au chapitre de Verdun, puis d’Arras puis de Reims auprès desquels il est tenu de chanter pendant les offices, et d’observer certaines règles sans être prêtre, touchant des prébendes et pouvant posséder des biens propres. Une bonne situation en somme !
Jean de Luxembourg meurt à la bataille de Crécy en 1346…de triste mémoire pour les Français. Pas de chance, mais il reprend du service auprès de la fille de Jean de Luxembourg, Bonne, puis de Charles II de Navarre, puis de Jean de Berry, puis de Charles de Normandie ! Il concilie toutes ses fonctions de clerc et vaillant chevalier et ne se fixe à Reims qu’en 1359. Son œuvre s’étoffe, tant sur le plan poétique que musical, religieux que profane.
Nombre de ses 400 poèmes seront transcrits en musique (Prima le parole…) comme c’était la coutume jusque-là, s’inscrivant majoritairement dans la tradition de l’amour courtois des trouvères médiévaux. Il en renouvellera toutefois profondément la composition musicale introduisant la polyphonie après le plain-chant monodique grégorien passant de l’Ars Antiqua à l’Ars Nova.
En 1363, il écrit sa « Messe de Notre Dame », première messe complète attribuée à un seul compositeur, œuvre à 4 voix capitale dans l’histoire de la musique par sa composition rigoureuse, son expressivité, sa complexité rythmique et sa beauté formelle.

Messe de Nostre Dame - Ensemble Euterpes Domus Direction Mauro Bedendi
Johannes Ciconia (1370-1412)
Johannes Cigonia ou Jean Cigogne dit « de Liège », compositeur et théoricien est le plus grand musicien entre Guillaume de Machaut et Guillaume Dufay. Considéré comme un musicien de transition, il est une figure complexe de l’histoire de la musique car sa biographie est difficile à préciser. Né à Liège, il serait le fils illégitime d’un prêtre et commença sa formation comme membre d’un chœur. Il voyagea beaucoup et est nommé vers 1400 « custos et cantor » (sacristain et professeur de chant) à la cathédrale de Padoue.
Il connaît la peste et les guerres avec Venise, mais en réchappe ! Il rédige un traité de Nova Musica, où il affirme la supériorité de la musique céleste qu’il enseigne. Il écrit motets et parties de messes mais compose aussi madrigaux, ballades et canon dont Le ray au soleyl que l’on écoutera. Il occupe de nombreux postes lucratifs : il mourra riche, célèbre et honoré à Padoue !
Guillaume Dufay (vers 1397-1494)
Né de Marie Du Fayt et d’un prêtre inconnu, comme Johannes Ciconia, (cela semble courant à l’époque…
Est-ce cela qui les a poussés vers une carrière ecclésiastique ?), il a vécu une vie active et itinérante qui l’a mené de Cambrai à Rome, en passant par la Cour des Malatesta à Rimini, Bologne, Tournai, Bruges, la cour de Savoie, celle des Médicis à Florence, Lausanne…et tout cela, en menant une carrière ecclésiastique, et écrivant et publiant de la musique qui l’a rendu célèbre dans toute l’Europe ! Bref, un personnage illustre considéré comme un compositeur très influent du XVème siècle.
Musicien des princes et du Pape, il entre à la cour pontificale en 1428 et c’est de là que l’on peut véritablement dater le début de sa carrière de musicien. Appartenant à la chapelle pontificale, il écrit des motets de circonstance pour les grands évènements, des messes et des œuvres profanes. Son célèbre Nuper rosarum flores est écrit pour la consécration de Santa Maria dei Fiore de Florence en 1436, année où il est nommé chanoine. En 1451, il est nommé « chantre illustrissime de Monseigneur le Duc de Bourgogne » (Philippe le Bon), puis séjourne auprès du duc de Savoie, voyageant entre Cambrai, la Savoie et l’Italie ! Il fut comblé d’honneurs avant de s’éteindre à Cambrai en 1474.
Sa musique, très élaborée, mais introduisant des harmonies douces et claires préfigure celle de la Renaissance.
Son Rondeau, Ce jour de l’an voudray joye mener, célèbre la nouvelle année dans un style raffiné d’une grande richesse polyphonique, caractéristique de l’école franco-flamande qu’il illustre si bien.

Mark Szabo Nuper rosarum flores
Guillaume Faugues (actif entre 1460 et 1475)
On connaît peu de choses de Guillaume Faugues excepté ses 5 messes.
Il est chapelain de la Sainte chapelle de Bourges et maître de chœur, où il a rencontré Johannes Ockeghem, le maitre de chapelle de Charles VII et de ses successeurs. Il fut plus célèbre qu’Ockeghem en son temps par ses messes parodies, telles les messes Vinus vina vinum, L’homme armé, Je suis à la mer et la Basse danse dont nous écouterons un extrait. Lors de ce concert pour parfaire votre culture musicale, vous pourrez vous familiariser avec les Instruments utilisés.


