"Un monde sacré !", à la rencontre des musiciens du Festival 2025

En 2024, nous avions évolué dans les paysages champêtres et montagnards au son des fifres et tambourins au milieu des bergers, au gré des symphonies pastorales et tableaux que la nature et les artistes nous avaient offerts.
Cette année, pour notre 16ème Festival, nous montons plus haut et atteignons les sphères célestes et ce qu’elles ont inspiré aux compositeurs qui ont su, par leur inspiration et leur talent sans limites, nous élever vers le sacré.
Il faut vous préparer à apprendre de nouveaux noms de musiciens qui enrichiront votre dictionnaire de musicologues déjà avertis et revoir votre latin !
Par la diversité des œuvres, nous évoluerons au travers des musiques les plus célèbres de la Renaissance mais surtout nous découvrirons aussi des artistes peu connus qui, éveillant notre curiosité, nous feront passer de la musique sacrée à une… « sacrée musique » !
Episode 6

Le thème de ce concert, la douleur de la Vierge au pied de la croix déplorant la mort du Christ, est un sujet fréquemment traité en peinture comme en musique. L’ensemble Clematis nous fera éprouver l’émotion de la Vierge, Saint Jean et Marie-Madeleine représentée ici par Hans Memling lors de l’exécution de la dernière œuvre du concert, de Giovanni Battista Ferrandini.
Giovanni Battista Vitali (1632-1692)
Né dans une famille de musiciens à Bologne, il est formé par le maître de chapelle de la basilique San Petronio, y devient chanteur. Il apprend le violone, (grande viole), le violon, le violoncelle et la composition.
Sa réputation locale l’amène à devenir membre de l’Accademia Filarmonica à la fondation de laquelle, il a participé. Il est nommé maître de chapelle à San Rosario. En 1674, il part à la cour de Francesco d’Este dont il deviendra maître de chapelle en 1684 et exerce aussi à la cour du Duc de Modène où il décèdera en 1692.
Son œuvre est assez diverse et conséquente. Outre des cantates et sonates d’église, des oratorios, psaumes et hymnes, ses Artificii musicali présentent en 60 morceaux sa conception très élaborée du contrepoint. Il est surtout connu pour ses sonates d’église et de chambre en trio qui ont contribué au développement de la musique instrumentale baroque et ont servi de référence à Corelli et Purcell.
Giovanni Battista Pergolesi (1710-1736)
Nous aurons l‘occasion de présenter Pergolèse de manière plus approfondie lors du dernier concert du Festival mais il faut s’arrêter sur ce Salve Regina. Le Stabat mater est un texte douloureux alors que le Salve Regina est un hymne glorieux mais ces deux œuvres ont été écrites la même année et à la toute fin de la vie, bien courte, de Pergolèse, en 1736, où la douleur est bien présente.
Les premières mesures rappellent celles du Stabat mater, puis le ou la soliste commence sa ligne vocale soit avec des valeurs longues soit avec d’importantes variations de registres pour s’apaiser à la fin de la première partie. La deuxième est plus spectaculaire, et passe de la véhémence à la supplication, la troisième plus contrastée entre les cordes et l’interprète, la finale s’apparente à un arioso léger et transparent. L’œuvre est empreinte d’une sérénité bouleversante.
Giovanni Baptista n’aura pas plus le temps de l’entendre que son Stabat mater, la phtisie l’emportera avant.
Salve Regina James Bowman
Georg-Friedrich Haendel (1685-1759)
Haendel est né en Allemagne, à Halle, doué pour la musique, bien que sans antécédents dans ce domaine, il est formé par Friedrich Wilhelm Zachow. Organiste et compositeur, il initie le jeune Haendel à tous les instruments au contrepoint, à la théorie musicale, à la musique d’église et lui fait connaître la musique allemande et italienne au travers des grands compositeurs de l’époque qu’il recopie. Très tôt il voyage. Il se rend à Berlin, puis à Hambourg où il travaille aux côtés de Johann Mattheson, musicien célèbre auquel il restera lié toute sa vie. Il séjourne 3 ans en Italie et s’établira définitivement en Angleterre. Il fréquentera les souverains et l’aristocratie européenne qui le soutiendront.
Bien sûr, il est mondialement connu par son oratorio le Messie, pour ses œuvres pour orgue et concerti grossi, ses cantates, sa Water Music et sa Music for the royal Fireworks, mais ce sont surtout ses 40 opéras qui lui valent sa renommée qui n’a pas cessé depuis le XVIIIème siècle. Il réalisera une magistrale synthèse entre toutes les musiques de l’Europe.
C’est un géant de la musique, à tous points de vue, car même physiquement, il est imposant !
On a toujours pensé à tort que Haendel n’était pas intéressé par la musique de chambre. Pourtant il en a écrit toute sa vie ! Le corpus représente une cinquantaine de pièces. Essentiellement des sonates soit pour un seul instrument et un continuo, soit en trio, soit plus. Lors du concert du 30 Juillet, nous écouterons une sonate à 5 instruments, proche d’un concerto ! Dans toutes ces œuvres, l’influence italienne se fait sentir. Que ce soit dans la structure, en 4 mouvements, ou par leur brièveté. On y retrouve des thèmes de ses oratorios, opéras et cantates, car il se citait lui-même souvent ! On retrouve le début de cette sonate dans un concerto pour hautbois.
Sonate à 5 Concertos pour Violon Academy of Ancient Music - Direction Richard Egarr
Giovanni Battista Ferrandini (1710-1791)
Encore un Giovanni-Battista, ou Jean-Baptiste, le troisième du programme ! Le prénom était à la mode aux XVII et XVIIIèmes siècles semble-t-il !
De Haendel à Ferrandini, il n’y a qu’un pas ou plutôt qu’une partition car l’œuvre de Ferrandini est tellement élaborée qu’elle a été longtemps attribuée à Haendel ! Alors rendons à César ce qui est à César et Pianto di Maria à Ferrandini.
Giovanni Battista Ferrandini est né à Venise sous le prénom de Zaneto auquel il préfèrera celui de Giovanni Battista ! Il est un italien germanisé comme Haendel sera un allemand anglicisé, comme tous les compositeurs italiens que nous avons vus aux Pays Bas deviendront des flamands ! L’Europe existait déjà !
Enfant prodige, Il est venu très tôt à Munich où Il passe l’essentiel de sa vie à la Cour de Bavière. Il est recruté comme premier hautbois dès 1722, puis devient en 1737 directeur de la musique de chambre et compte parmi ses élèves le Prince électeur Maximilien III. Son opéra Caton d’Utique inaugure le Théâtre de la Résidence à Munich en 1753. Il compose des opéras pour la Cour et contribue au développement de l’opera seria dans le monde germanique. Il laisse en outre, des cantates, des canzonettes, des arias mais aussi, une œuvre instrumentale digne d’intérêt. Malade, il se réfugie à Padoue où il recevra la visite de Leopold et Wolfgang Amadeus Mozart en 1771 qui jouera pour lui.
Revenu à Munich, il y décède en 1791.
Sa cantate la plus célèbre, Il pianto di Maria, témoigne d’une piété aussi sincère qu’élevée, mettant en scène les doutes et les tourments de la Vierge dans un lyrisme digne des cantates de Bach et de l’opéra.
